Au Soudan du Sud, les marais du Sudd sont souvent inaccessibles
Le Sudd est une vaste étendue marécageuse dans le centre du Soudan du Sud, formée par la rivière du Nil Blanc. La zone que couvre le marais est l’une des plus grandes zones humides de la planète dans le bassin du Nil. Sa taille est très variable avoisinant plus de 30 000 kilomètres carrés en moyenne, mais pendant la saison des pluies et selon les eaux affluentes, le Sudd peut s’étendre sur plus de 130 000 km² soit la taille de l’Angleterre.
Le Sudd est arrosé par les affluents du Nil Blanc, à savoir la rivière Al-Jabal (la « Rivière de la Montagne) au centre et la rivière Al-Ghazal (Bahr el-Ghazal) à l’ouest. Dans le Sudd, la rivière coule à travers de multiples canaux entremêlés dans un schéma qui change chaque année. Le papyrus, une herbe aquatique, et la jacinthe d’eau poussent en fourrées denses dans l’eau peu profonde, qui est peuplée de crocodiles et d’hippopotames. Parfois, cette végétation « se libère de ses amarres », créant une île flottante végétale mesurant jusqu’à 30 km de longueur. Ces îles se décomposent au fil du temps.
Le Sudd est considéré comme quasiment impraticable, que ce soit par la route ou par bateau. Densément peuplé de roseaux, d’herbes, de jacinthes d’eau et autres plantes aquatiques, le Sudd peut former des blocs massifs de végétation qui peuvent changer de position et bloquer les canaux navigables créant un réseau en constante évolution. Parfois, il n’y a aucun canal sur lequel un bateau peut naviguer à travers le marais. Depuis des siècles cette région a empêché les explorateurs de voyager le long du Nil et est seulement habitée par le peuple nilotique Nuer.
À la fin des années 1970, la construction du canal de Jonglei débuta, dont l’enjeu était d’éviter au Nil Blanc de parcourir le marais du Sudd, induisant une forte évaporation de l’eau. Mais le projet, qui aurait asséché les marécages du Sudd et aurait eu un impact néfaste sur l’agriculture, a été stoppé par l’Armée populaire de libération du Soudan (APLS) en 1984. Lors de l’arrêt des travaux, 240 km sur les 360 km avaient déjà été creusés, depuis lors aucun travail supplémentaire significatif n’a été entrepris.
Une des raisons de ce projet de canal était d’améliorer l’approvisionnement en eau en Egypte. Près de la moitié de l’eau du Nil Blanc se perd dans les marécages que la végétation absorbe ou que les animaux boivent. Les bénéfices de ce projet seraient partagés par l’Egypte et le Soudan, « cédant » leur problème au Sud-Soudan. Les enjeux environnementaux et sociaux complexes impliqués, notamment la faillite de la pêche, la sécheresse des pâturages, la baisse du niveau des eaux souterraines et la diminution des pluies dans la région, peuvent toutefois limiter la portée du projet en termes pratiques. L’assèchement du Sudd est également susceptible d’entraîner des effets environnementaux massifs comparables à ceux du lac Tchad ou de la mer d’Aral.
Ces photos de Yann Arthus-Bertrand nous montrent des villages dans les marais du Nil Blanc près de la ville de Bor, dans l’Etat de Jonglei, au Soudan du Sud.
Photos : yannarthusbertrand.org.