Sur les traces de Jacques Cartier : le troisième et dernier voyage (3/3)

Sur les traces de Jacques Cartier : le troisième et dernier voyage (3/3)
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Après un premier voyage plein de découvertes et une deuxième exploration très mouvementée, suivez les traces de l’ultime voyage de Jacques Cartier au Canada !

Jamais deux sans trois : l’expression est parfaite pour résumer les aventures de Jacques Cartier sur les terres canadiennes, jadis nommées Nouvelle-France. Après avoir découvert Terre-Neuve, la Gaspésie, Stadaconé et Hochelaga, et malgré le cuisant échec du deuxième voyage, Jacques Cartier obtient à nouveau le feu vert de François Ier pour repartir outre-Atlantique.


Mais le Malouin ne sait pas encore que cette ultime expédition lui réserve bien des surprises…

Vous venez d’arriver à bord ? Commencez l’aventure avec l’épisode 1, avant d’enchaîner avec l’épisode 2

Un voyage sous tension

Le changement de cap

Cinq années se sont écoulées depuis le retour de Jacques Cartier à Saint-Malo. Même si le deuxième voyage fut éprouvant, l’envie de richesse et de découverte est toujours une obsession pour le Gouverneur de Nouvelle-France. C’est donc logiquement que le Malouin demande à François Ier une troisième expédition, pour enfin trouver le chemin vers l’Asie, ainsi que les fameuses richesses du Royaume du Saguenay.

Problème, le précédent voyage ne joue pas en sa faveur. La crédibilité auprès du roi n’est plus au beau fixe. En effet, le Malouin n’a pu naviguer sur la totalité du fleuve Saint-Laurent, et François Ier n’a aucune pierre précieuse à se mettre sous la dent. Les chances de revoir Cartier reprendre le large pour la couronne de France semblent faibles. Pourtant le Breton va bel et bien réussir son coup.


Souvenez-vous, avant de rebrousser chemin vers les côtes bretonnes, Cartier piégea les Iroquois lors d’une soi-disant fête, permettant ainsi aux Français de kidnapper certains Amérindiens, dont le chef Iroquois, Donnaconna. Une fois en France, ce dernier comprend ce que la France recherche : l’or du Saguenay. Donnaconna va donc dire aux Français ce qu’ils rêvent d’entendre, en contant la légende du Saguenay et ce qu’il s’y cache. Des révélations qui, au fil des années, font céder François Ier. Cartier peut repartir en Nouvelle-France.

Néanmoins, le monarque souhaite axer ce troisième voyage sur les richesses et la colonisation. Fini l’aventure maritime, il faut conquérir ces terres et y trouver des ressources.

Un nouveau commandant

Mais l’objectif principal n’est pas l’unique changement exigé par François Ier. Le roi se méfie désormais de Cartier et souhaite garder un œil sur lui, d’autant plus qu’il doute également de ses capacités à coloniser la Nouvelle-France.

Il décide ainsi de le mettre sous tutelle et confie la responsabilité du voyage à Jean-François de La Rocque de Roberval, homme de Cour et en qui François Ier a totalement confiance.

Jacques Cartier n’est donc que le second de ce voyage. Une rétrogradation qui scandalise l’intéressé. D’ailleurs, la relation entre l’explorateur et Roberval est quasi inexistante, et ce dès la préparation du voyage. Le premier reproche au second de prendre un temps fou inutilement. Le 23 mai 1541, c’en est trop pour l’explorateur malouin, l’attente a trop durée. Le Malouin prend le large sans attendre Roberval, qui devra trouver un autre navire pour se rendre de l’autre côté de l’océan.


La découverte des minerais

Stadaconé et ses caps

Si les quelques colons l’accompagnant décident rapidement de s’installer sur les berges du Saint-Laurent, le Breton n’en a que faire. Le désormais rebelle n’a qu’une obsession : trouver des ressources. Cartier croit en sa destinée, celle qui fera de lui un homme richissime. C’est d’ailleurs ici que nous reprenons notre aventure.

Souvenez-vous, lors du dernier épisode, nous venions de découvrir Québec, la ville construite sur et autour du village iroquois de Stadaconé. Après avoir longé le Saint-Laurent et pris un peu de hauteur, il est temps de partir à la chasse des caps.

Le premier cap que Cartier fouille se nomme Cap Rouge. Notre explorateur y repère des falaises dont la couleur de la pierre est rougeâtre, créant un contraste de couleur avec le bleu du fleuve, dont l’eau caresse le bord. Son flair lui fait penser que les pierres précieuses ne sont pas loin. Il ordonne ainsi d’installer un fort, qu’il nomme Charlesbourg-Royal.

Nonobstant, après une petite vadrouille, les yeux du Breton remarquent un endroit encore plus intéressant. Un cap où de nombreuses pierres scintillent. Cartier en est persuadé, son rêve vient à l’instant de se réaliser. Selon lui, un tel éclat ne peut provenir que d’un diamant ! Perché sur les hauteurs de cette colline, l’émotion le débordant, le Malouin ne touche plus terre. La vue panoramique lui procure le même sentiment qu’au Mont-Royal : celui d’être sur le toit du Nouveau Monde.

Ce sentiment, nous pouvons également le ressentir. Le panorama sur Québec est du plus bel effet, et la présence d’une citadelle du XIXe siècle renforce cette impression. Comme si rien ne pouvait nous stopper.


C’est aussi un moment unique, où nous pouvons réaliser tout ce que nos aïeux sont parvenus à construire en seulement 500 ans. Une chance que notre explorateur n’a évidemment pas eu. Et aujourd’hui, même si la Citadelle de Québec est désormais l’attraction principale de l’endroit, d’aucuns n’oublieront qui nomma cette colline le Cap Diamant.

Enfin, terminons notre tour des caps en contrebas du Cap Diamant, où là aussi le navigateur aperçoit des pierres briller de mille feux. Après avoir emprunté les escaliers homonymes, nous voici au Cap Blanc, dont le nom serait tiré d’une dénomination amérindienne qui ferait référence à l’apparence primitive du cap.

Pourtant, c’est bel et bien l’un des plus beaux exemples de l’architecture coloniale française qui nous est proposé. À l’instar du Vieux-Québec et de son centre, certaines maisons nous rappellent immédiatement l’architecture française du XIXe siècle. Comme si nous étions dans l’Ouest de la France, en train de flâner dans une bourgade de Charente ou de Vendée. Une impression qui s’amplifie ensuite, lorsque nous apercevons l’église Notre-Dame-de-la-Garde.

Elle aussi ne doit pas son nom au hasard. En effet, au XIXe siècle, des navigateurs de Québec avaient eu vent de la construction d’une église, située à Marseille, dédiée à Notre-Dame-de-la-Garde, que les marins marseillais adulaient puisqu’elle les protégerait lorsque ces derniers prennent le large.

Ainsi, lors de son inauguration, des marins de Québec auraient alors demandé à ce que l’église porte le même nom.

Si dans notre cas, ces lieux ont un attrait touristique de premier choix, pour notre explorateur, il n’y aucun à temps à perdre. Il faut ramasser le maximum de ressources, jusqu’à ce que le bateau ne puisse plus flotter.

Le royaume du Saguenay

Avec la découverte des trois caps, Jacques Cartier a enfin réussi à trouver des richesses et sait qu’il peut rentrer en France sans s’attirer les foudres de François Ier. Mais ne pensez pas que notre aventure se termine ici ! L’ex-gouverneur de Nouvelle-France ne compte pas rentrer sans percer le mystère du fameux royaume du Saguenay. Et nous non plus !

Selon les informations de Domagaya, fils du chef Donnacona, le chemin pour le Saguenay commence au nord de Stadaconé, à l’embouchure de la rivière qui conduirait vers d’impressionnants lacs. Le passage, Cartier parvient à le trouver. Ce qu’il ne savait pas, c’est qu’un fjord l’attendait.

Nous voici devant l’un des plus beaux paysages d’Amérique du Nord. De la beauté de l’eau azur à la magnificence des falaises verdoyantes, tout est absolument sublime. De quoi nous rappeler l’émotion ressentie lors de notre découverte de la Gaspésie. Mais le meilleur arrive.

D’ailleurs, la suite de notre chemin, il est impossible d’affirmer que Jacques Cartier l’ait fait. Si le navigateur a bel et bien aperçu le fjord, et trouvé là aussi des pierres précieuses, il est impossible de savoir si le Breton est allé plus loin. Encore aujourd’hui, les historiens ne sont pas d’accord sur les faits. Il se dit même que le Malouin y serait allé dès son deuxième voyage.

Mais qu’importe ce que dit l’Histoire. La place du Royaume du Saguenay et de sa légende est centrale dans l’aventure du perfide breton. Et surtout, manquer ces paysages serait une erreur monumentale.

Une erreur car, au bout de la rivière, c’est tout simplement l’un des plus beaux lacs du monde qui nous attend. Bienvenue à notre ultime étape : le lac Saint-Jean. Ce qui frappe d’entrée, c’est l’immensité des lieux, qui confirme nos dires du début. À savoir que tout est plus grand, plus majestueux. Il suffit de se mettre au centre du lac pour comprendre que l’Humain n’est qu’un minuscule élément de la nature.

Cette idée s’accentue également grâce aux côtes, où les sapins sont rois, grâce à leur grande taille et à l’harmonie verte qu’ils imposent.

Laissez-vous bercer par le silence, admirez le paysage et prenez le temps de ressasser toute notre aventure. Car c’est ici que s’arrête notre expédition sur les traces de Jacques Cartier. Un voyage pas comme les autres, pour une histoire pas comme les autres.

Une fin dramatique

Mais si pour nous, le voyage prend fin, ce n’est pas encore le cas pour le plus célèbre navigateur de l’Hexagone. Une fois le navire rempli de pierres précieuses, Cartier décide d’entamer le trajet du retour. Direction donc le Golfe du Saint-Laurent, pour contourner Terre-Neuve et se jeter dans l’Atlantique.

La désobéissance de Cartier

Mais alors que Terre-Neuve ne se situe plus qu’à quelques nœuds, le Malouin aperçoit un autre bateau. Ce dernier arrive justement des côtes de Terre-Neuve. Il s’agit tout simplement de Roberval, le commandant de l’expédition, parti en retard et planté par un Cartier exaspéré et impatient.

Leur rencontre loin du Royaume de France ne se passe pas comme prévu. Roberval exige au Malouin de faire demi-tour, qui refuse catégoriquement. L’homme de confiance du roi doit donc découvrir le Nouveau-Monde sans éclaireur, et faire connaissance avec les Amérindiens sans intermédiaire.

D’ailleurs, les premiers contacts avec les autochtones sont extrêmement compliqués, la faute à Cartier et ses manipulations.

En effet, lorsque les Iroquois voient le Breton débarquer une troisième fois, ils n’aperçoivent pas leur chef Donnacona, ni les autres membres de la tribu que les Français avaient kidnappé. Le navigateur leur explique que leurs amis se sont mariés en France, sont très heureux et ne souhaitent absolument pas revenir ici.

Pourtant, la réalité est tout autre. Exceptée la jeune fille, seule survivante, tous les Amérindiens n’ont pas survécu à l’Europe et aux maladies du Vieux Continent. Et même si la tribu ne saura jamais la vérité sur leurs compagnons, le mensonge leur a suffi pour se méfier des Français, une bonne fois pour toute.

Par conséquent, le nouveau gouverneur fait face à la défiance, et les différentes tribus amérindiennes empêchent les Français de s’installer sur les terres canadiennes. La colonisation est un échec, et Roberval ne peut que constater le revers.

La grande déception

De son côté, en août 1542, Jacques Cartier arrive enfin au port de Saint-Malo. À peine débarqué, le Malouin ne pense qu’à une seule chose : faire expertiser les pierres précieuses qu’il vient de ramener, pour ensuite se présenter face à François Ier tel un héros. À cet instant, Cartier est loin d’imaginer qu’une mauvaise surprise l’attend.

Car oui, après expertise, le navigateur apprend que toutes les pierres qu’il a ramené d’Amérique ne sont que du quartz et de la pyrite. Des pierres n’ayant aucune valeur. Après trois âpres voyages, des mois de navigation et des choix peu scrupuleux, le rêve de Jacques Cartier s’effondre. Au final, tout ce qu’il apportera à la France, c’est un proverbe : « Faux comme un diamant du Canada ».

Il finira sa vie à Saint-Malo, dans son manoir, comme il l’a toujours prévu. Mais sans les richesses qu’il a lorgné toute sa vie.

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